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Clair de Plume 34 association vicoise des Ecrivains colporteurs

EDITION ASSOCIATIVE. nos écrivains, leurs passions et nos actions : expositions, ateliers d'écriture, rencontres littéraires, patrimoine, histoire, écologie

Les forçats de la garrigue par Joseph Teyssier

Publié le 3 Avril 2018 par CLAIR DE PLUME in nos écrivains, patrimoine, articles de gardiolarem

 

Les forçats de la garrigue.

 

De courageux seniors œuvrent dans la garrigue,

Leurs mains d'acier prennent de bric de broc

Les étranges cailloux, en vrac ou bien en stock    

Et ne craignent, ni force et surtout ni fatigue.

 

Ces hommes olympiens dans leurs faibles ardeurs

Ne rechignent surtout  aux pleurs  de leurs cuirasses 

Pour une digne tâche aux mémoires voraces

Et fascinent alors leurs fraternels labeurs.

 

La minuscule pierre, une autre plus coquette,

Et l'autre, un mastodonte, au prestige ancestral,

Des vestiges pesants d'un antique augural

Témoignent le respect d'une fougue concrète.  

 

Enfermées dans des gants, les mains des bâtisseurs

Malhabiles au soin et les égratignures

Ne blessent leur honneur dans leurs piètres armures.

Ils ne lésinent point ces vaillants constructeurs.

 

Ces diables libertins caressent la caillasse,

Ces actifs dévorant les maux jusqu'aux genoux 

Montent la capitelle en d'hirsutes remous,

Il faut bien supposer dominer la crevasse.

 

Ces ogres de devoirs envers les souvenirs

Exhibent des réveils d'une main baladeuse

Pour enfanter l'amour d'une foi doucereuse,

Un fidèle travail à leurs vaillants désirs.    

 

Nous entendons parfois de gaillardes tirades        

Escortées d'éclats de voix comme de boute-en-train

Il fait bon de mêler le rire et le turbin,

L'union fait la force aux grivoises boutades.

 

Il est juste à l'arène, au détour du chemin,

Dans mon prudent écrit leur consacrer l'hommage

Qu'ils méritent enfin de leurs mains à l'ouvrage.

L'amitié se sacre avec un peu de vin.

 

Ces courageux copains, debout sur les cavernes,

Ce sont des seniors, de simples sénateurs

Qui peinent sans vergogne outre que des seigneurs

Ils gagnent le mérite et l'amour qu'ils maternent.

 

 

Joseph Teyssier

 

Éloge.

 

C'est comme un pèlerinage quand je promène mon chien dans la garrigue, du côté du Rabassou, et je ne peux empêcher mon cœur battre la chamade quand je contemple ces capitelles.

         Cela fait plus de vingt ans que les capitellistes, ces forçats de la Gardiole, bataillèrent avec les  pierres blanches pour construire ces édifices.

  On dit qu'ils remuèrent plus de vingt tonnes de ces rochers dont certaines pèsent quelques dizaines de kilos, deux cents kilos sans exagérer.

  Ils restaurèrent de même un four à chaux sur les pentes arides de la colline et débroussaillèrent un chemin vicinal.

  Sur des sentiers ils nous lèguent un patrimoine que les ancêtres avaient façonné.

  Les garrigaïres n'étaient-ils pas les paysans de la Gardiole ? C'est ce nom due les amis du vieux musée de Frontignan ont dénommé les fidèles du terroir.

  Oyez braves gens ! Profitez de vos belles balades pour contempler les œuvres d'hommes de l'ombre. Elles méritent être protégées par l'Unesco.  

 

Mots créés par les amis du musée

 et du vieux Frontignan.

 Garrigaïres, paysans de la garrigue,

Capitellistes, bâtisseurs de capitelles,

Occitan cairn, petit édifice de quelques pierres.

 

 

 

Joseph Teyssier

 

Les capitellistes.

 

 

Les courageux héros, maintenant fatigués,                                   

Ont rangé les outils et la hache de guerre,                                  

La potence, la pelle et les marteaux blasés.

D'un pénible devoir ils ne se plaignent guère

Pour fournir à leurs bras un loisir de croisière.

Ils ont écrit l'ouvrage aux angles du terroir

Et gardent mûrement dans leur secret tiroir

Une sage fierté comme dans un beau livre.

Les modestes secrets d'un souverain miroir

Honorent leurs bonheurs au prix d'un savoir vivre.

 

Le docile gecko en ces endroits pénards

Prélasse sa quiétude et les capitellistes

Dans leurs glorieux efforts imitent les bagnards

Qui dans leurs labeurs sont d'ardus spécialistes,

Ils bichent décors – traditionalistes.

Le fier garrigaïre, au passe-temps secret,

Sifflote son épreuve à l'objectif discret

Comme un samaritain dans un bon égrappage

Demande le répit d'un muscat guilleret

Que la belle cigale obtempère au passage.

 

Maintenant, stridulons le repos des guerriers,

Ils le méritent bien, leur juste gratitude

À septante ans et plus  mais ces aventuriers

De nonante ans aussi jusqu'à la quiétude

Ils broderont le cairn, la nouvelle habitude.

Ils auront turbiné  comme des pastoureaux 

Les capitelles, mais, aussi le four à chaux,                           

Composent leur cheptel, le garant des ouvrages,

Oyez braves soldats, merci pour vos travaux.

Oyez les retraités, vous, les vétérans d'âges !         Cairn.    (Occitan.)

 

 

Les forçats de la garrigue par Joseph Teyssier
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